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April 2022
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Actes d'enquête : Quels sont vos droits pendant une perquisition ?

1/ Qu'est-ce qu'une perquisition ?

Le code de procédure pénale établit un répertoire des actes d’enquête, incluant la perquisition, à la disposition des policiers et des gendarmes en charge de résoudre des enquêtes. Ces outils contribuent à la manifestation de la vérité en permettant aux enquêteurs de rassembler les preuves nécessaires à la poursuite des délits et des crimes en droit pénal, par le procureur de la République ou le juge d'instruction.

La perquisition fait partie des outils du droit pénal à la disposition des enquêteurs. Elle n’est pas définie par le code de procédure pénale qui prévoit uniquement les régimes et les garanties entourant cet acte d’enquête.

Il est revenu à la jurisprudence de définir la perquisition comme la recherche dans tout lieu clos, incluant le domicile, d’indices ou d’objets utiles à la manifestation de la vérité, soit en permettant d’établir l’existence d’une infraction ou d’en déterminer l’auteur (Crim, 29 mars 1994, n° 93-84.995).

Mise en garde #1 : Le terme de « domicile » est entendu largement. Il ne s’agit pas seulement du lieu où vous avez votre établissement principal mais de tout lieu où vous avez le droit de vous dire chez vous. Sont ainsi inclus : le terrain clos appartenant à une personne morale, le domicile du parent du mis en cause, une chambre d’hôtel, un véhicule professionnel ou encore un bateau aménagé. Il en est de même des locaux professionnels pouvant faire l’objet d’une perquisition.

On écartera de cette étude les visites domiciliaires des administrations relevant de procédures administratives (Autorité de la Concurrence, Autorités des Marchés Financiers, URSSAF…) et les perquisitions administratives effectuées dans le cadre de l’état d’urgence qui feront l’objet d’un autre article.

La perquisition est un acte violent et brutal qui permet aux services d’enquête de rentrer dans des lieux pour rassembler des preuves utiles à la résolution de l’enquête dont ils sont saisis, et de les confisquer.

2/ Les cadres procéduraux d’une perquisition

La perquisition est effectuée dans le cadre des poursuites pénales consécutives à la commission d’un délit ou d’un crime.

2.1 L’enquête de flagrance

Il s’agit d’une enquête de police relative à une infraction en train de se commettre ou venant d’être commise, sous le contrôle du procureur de la République. Cette enquête peut être conduite pendant 8 jours pour tout crime ou délit flagrant, et peut être prolongée de 8 jours supplémentaires en cas d’investigations nécessaires ne pouvant être différées. Depuis 2010, tout officier de police judiciaire peut faire une perquisition avec une autorisation préalable du procureur de la République. Celui-ci prend des réquisitions judiciaires afin de délivrer un mandat de perquisition (Articles 53 et suivants du Code de procédure pénale).

2.2 L’enquête préliminaire

Une perquisition peut être effectuée en cas d’ouverture d’une enquête préliminaire. Il s’agit d’une enquête de police judiciaire diligentée soit d’office, soit sur les instructions du Procureur de la République qui décide de l'ouverture d'une enquête préliminaire. Sa durée varie en fonction du type d’affaire traitée (Articles 75 et suivants du Code de procédure pénale).

2.3 L’instruction ou l’information judiciaire

Le juge d’instruction peut se rendre avec son greffier à votre domicile pour procéder à une perquisition. Lorsque le magistrat est dans l'impossibilité́ de procéder lui-même à cet acte, il donne alors commission rogatoire aux enquêteurs, les officiers de police judiciaire, pour en assurer l'exécution (Article 92 du Code de procédure pénale). Cette perquisition peut avoir lieu avant ou après votre mise en examen.

Cependant, vos droits durant la perquisition sont différents selon le cadre précité et selon la nature de l’infraction considérée.

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3/ Quels sont les droits attachés à une perquisition ?

Une perquisition a lieu à votre domicile. Les enquêteurs ont l’obligation de respecter les droits personnels ainsi que les droits de la défense.

Il convient de noter que votre domicile peut être perquisitionné lorsque la personne est placée en garde à vue, lorsqu'il existe des raisons plausibles de soupçonner qu'elle a commis un crime ou un délit puni d'une peine d'emprisonnement.

3.1 Le respect d’horaires

En principe, qu’il s’agisse d’une enquête judiciaire ou d’une instruction, les forces de police doivent respecter le principe des heures légales de perquisition diurne, de 06h00 à 21h00 (Article 59 du Code de procédure pénale).

Mise en garde #2 : Une perquisition qui commencerait à 6h00 et se terminerait à 23h00 est légale, l’essentiel étant que les enquêteurs aient commencé leur perquisition entre 6h00 et 21h00.

Toutefois, il existe des règles dérogatoires dans les cas suivants :

  • En cas de délinquance et de criminalité organisée : depuis 2016, une perquisition de nuit (entre 21h00 et 06h00) peut vous être imposée après autorisation préalable du Juge des libertés et de la détention.
  • En cas d’enquête de flagrance, la perquisition est possible en tout lieu, même à votre domicile (Article 706-89 du Code de procédure pénale). En cas d’enquête préliminaire, la perquisition nocturne est possible en tout lieu autre qu’un domicile (Article 706-90 du Code de procédure pénale).
  • En cas d’infractions dont la peine encourue est égale ou supérieure à 3 ans : depuis 2019, une perquisition nocturne peut aussi vous être imposée en phase d’enquête préliminaire après autorisation du Juge des libertés et de la détention (Article 76 du Code de procédure pénale). Celle-ci est uniquement pour une liste d’infractions spécifiques, pour lesquelles la peine encourue est supérieure ou égale à 3 ans d’emprisonnement prévue par le Code de procédure pénale (Article 706-73 du Code de procédure pénale).
  • En cas d’infractions à caractère terroriste : la perquisition nocturne est possible au domicile dans le cas spécifique des infractions de terrorisme en enquête préliminaire (Article 706-90 du Code de procédure pénale).
  • En cas de procédure d’instruction et de possession d’arme : depuis 2014, il est possible pour les policiers de procéder à des perquisitions chez un mis en examen soupçonné de détenir une arme lorsqu’elle est mise en examen, sous contrôle judiciaire ou sous assignation à résidence avec surveillance électronique (Article 141-5 du Code de procédure pénale).
  • En cas de tout lieu ouvert au public lorsqu’il est constaté que des personnes se livrent à la prostitution : tout hôtel, maison meublée, pension, débit de boissons, boite de nuit ou lieu de spectacle peut être perquisitionné en dehors des heures légales en cas de soupçon de prostitution ou de proxénétisme (Article 706-35 du Code de procédure pénale).
  • En cas de locaux utilisés pour user, fabriquer, transformer ou entreposer illicitement des stupéfiants : une nouvelle fois, une perquisition nocturne est ici possible pour les forces de police ou de gendarmerie (Article 706-28 du Code de procédure pénale).

Cependant, ces techniques spéciales d'enquête exigent une motivation particulière de la part du juge : il doit démontrer que les perquisitions nocturnes répondent à des conditions de nécessité et de subsidiarité rendant impossibles les perquisitions aux heures légales (entre 06h00 et 21h00).

Votre avocat est d’une aide précieuse, pouvant contester la légalité de l’ordonnance prise par le juge devant le tribunal, pouvant entraîner la nullité de la perquisition et des objets et documents saisis.

3.2 La présence du maître des lieux ou son consentement

Selon le cadre de l’enquête, vos droits sont ici différents :

Mise en garde #3 : Des règles dérogatoires sont une nouvelle fois présentes pour les crimes et délits en bande organisée. Lors d’une enquête de flagrance ou d’une instruction, la perquisition peut se dérouler sans votre présence sous certaines conditions. L’acte se déroule alors en présence de deux témoins, ou d’un représentant choisi. Il en est de même pour l’enquête préliminaire : il est alors possible de perquisitionner votre domicile sans votre consentement après décision motivée du juge des libertés et de la détention.
  • En enquête de flagrance : comme le rappelle l’article 57 du Code de procédure pénale, la présence de la personne au domicile est obligatoire sans que soit requis son consentement.
  • Pour autant, si la personne est absente de son domicile, la perquisition est possible sous 2 conditions alternatives : si la personne désigne un représentant pour assister à la perquisition, ou si 2 témoins sont requis par l’officier de police judiciaire pour y assister.
  • Cette même exigence est applicable aux sociétés. La présence d’un représentant qualifié est alors demandée, de même que la présence du dirigeant social si la perquisition est réalisée dans son bureau personnel.
  • En enquête préliminaire : l’article 76 du Code de procédure pénale requiert le consentement de la personne voyant son domicile perquisitionné. Le consentement donné pour une perquisition est irrévocable et s’applique aux fouilles et saisies associées.
  • Durant l’information judiciaire : les mêmes règles que la perquisition en enquête de flagrance sont applicables. La personne doit être présente. En cas d’absence, celle-ci peut se dérouler en présence de 2 de ses parents ou alliés présents sur les lieux, ou en présence de 2 témoins ne relevant pas de l’autorité administrative des policiers.
Mise en garde #4 : Dans le cadre du secret professionnel, des règles dérogatoires plus protectrices sont applicables dans le cas d’une perquisition d’un cabinet de médecin, notaire, avoué ou huissier, ou dans les locaux d'une entreprise de presse ou de communication (Articles 56-1 à 56-5 du Code de procédure pénale).

La présence de certaines personnes est alors obligatoire :

  • Pour le cabinet d’avocat ou de son domicile : la présence du bâtonnier ou son délégué
  • Pour le cabinet du médecin, notaire, avoué ou huissier : la personne responsable de l'ordre ou de l'organisation professionnelle ou son représentant

Pour ce type d’investigations, le juge d’instruction doit être présent, en cas d'ouverture d'une information judiciaire, et ne peut pas le déléguer à un officier de police judiciaire. (Articles 56-1 à 56-3 du Code de procédure pénale).

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3.3 En matière de saisie de vos biens

La perquisition est aussi fréquemment accompagnée de saisie d’indices, pour procéder à des constatations afin de caractériser l’infraction pénale pour laquelle vous pouvez être mis en cause.

Peuvent ainsi vous être saisis des papiers, documents, données informatiques ou tout autre objet paraissant avoir participé à l’infraction (Articles 54 et 56 du Code de procédure pénale). Ces derniers sont ensuite immédiatement inventoriés par procès-verbal et placés sous scellés (Article 56 du Code de procédure pénale).

Des règles spéciales sont prévues pour certains objets :

  • La saisie de fonds et de valeurs : si la saisie porte sur des lingots, espèces, ou effets de valeurs, ces biens sont déposés à la Caisse des dépôts et consignations ou à la Banque.
  • La saisie d’un animal vivant : le juge peut décider de la vente de l’animal, de son prêt ou de son euthanasie.
  • La saisie de données informatiques : la saisie de ces pièces consiste soit au support physique de ces données (disque dur, clé USB), soit en une copie réalisée lors de la perquisition.

4/ Comment contester une perquisition ?

Une fois que la perquisition a eu lieu, il existe deux garanties principales permettant aux justiciables de préserver leurs droits

D’une part, dans le cadre d’une information judiciaire ou lors de son renvoi devant une juridiction de jugement, votre avocat peut soulever la nullité de la perquisition aux motifs que les dispositions de la procédure pénale française n’ont pas été respectées.

Votre avocat peut demander pendant l’information judiciaire la levée des objets saisis et placés sous scellés dès lors qu’ils n’ont pas de lien avec l’enquête en cours et que leur saisie apparaît disproportionnée.

D’autre part, ordonner une perquisition est par nature un acte brutal et violent pouvant occasionner des dommages dans les lieux qui sont perquisitionnés (porte forcée, vitre cassée, dégradation des meubles…). Dans ce cas, la personne perquisitionnée peut solliciter l’État pour se voir rembourser les frais de réparation des dégâts occasionnés.

Pour effectuer cette demande, il convient de remplir trois conditions :

  • Être un tiers à la procédure justifiant la perquisition, le suspect, le gardé à vue ou le mis en examen ne pouvant effectuer une telle demande,
  • Avoir subi un dommage personnel,
  • Avoir effectué les réparations en conservant les factures.

Si ces conditions sont remplies, la procédure se déroule en deux temps :

  • Une première phase amiable dans laquelle la personne, tiers à la procédure ayant justifié la perquisition, doit écrire au Ministère de la Justice en fournissant les factures de réparation. Si cette demande est acceptée, la personne se verra rembourser 90% du montant des factures, 10% restant à la charge de la personne au titre de la condition d’anormalité ;
  • En cas de refus du remboursement de la part du Ministère de la Justice, une seconde phase contentieuse se déroule via une saisine du tribunal administratif aux fins d’engager la responsabilité de l’État pour rupture d’égalité des citoyens devant les charges publiques.

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