Pénal
15
March 2022

Demandes de mise en liberté : précisions de Maître Juliette Chapelle

Demandes de mise en liberté : précisions de Maître Juliette Chapelle

Maître Juliette Chapelle a répondu aux questions de Ouest-France sur les demandes de mise en liberté dans le contexte de l'affaire Jubilar.

Six questions sur les multiples demandes de remise en liberté de Cédric Jubillar

Par Jeanne Nicolle-Annic

Les avocats de Cédric Jubillar, soupçonné du meurtre de son épouse Delphine, ont plaidé mardi 15 mars 2022 sa remise en liberté. Il s’agit de la quatrième requête de ce type en neuf mois. Mais en quoi consiste cette procédure ? Qui examine cette requête ? A-t-elle des chances d’aboutir ?

Ce mardi 15 mars, les avocats de Cédric Jubillar ont plaidé pour la quatrième fois en neuf mois devant la chambre de l’instruction de la cour d’appel de Toulouse la mise en liberté de leur client. Celui-ci est soupçonné du meurtre de son ex-compagne, Delphine, disparue dans la nuit du 15 au 16 décembre 2020. Le parquet général a requis son maintien en détention. La chambre de l’instruction de la cour d’appel rendra sa décision le 22 mars.

Le 11 février, lors d’une convocation de leur client devant les juges d’instruction, ses avocats avaient annoncé qu’ils déposeraient des demandes de mise en liberté, et feraient appel des rejets, tant que Cédric Jubillar serait à la maison d’arrêt de Seysses, près de Toulouse. Ces requêtes sont-elles fréquentes ? À qui sont-elles adressées ? Ont-elles des chances d’aboutir ? On fait le point.

1. Qui décide ?

C’est le juge des libertés et des détentions, saisi par le juge d’instruction, qui examinera la demande déposée par les avocats de Cédric Jubillar. Soit il fait droit à cette demande, et autorise la mise en liberté avec un contrôle judiciaire, soit il rejette cette demande. La personne peut ensuite faire appel devant la chambre de l’instruction​, complète Juliette Chapelle, avocate pénaliste auprès du barreau de Paris.

2. Sur quels éléments le juge fonde-t-il sa décision ?

Ceux-ci sont définis dans l’article 144 du Code de procédure pénale. S’il est démontré que le maintien en détention est le seul moyen de conserver les preuves ou les indices matériels qui sont nécessaires à la manifestation de la vérité ​en premier lieu, d’empêcher une pression sur les témoins ou les victimes ainsi que sur leur famille​, ou encore d’empêcher une concertation frauduleuse entre la personne mise en examen et ses coauteurs ou complices​, alors le juge n’accèdera pas à la demande.

D’autres éléments, relatifs au mis en examen lui-même, sont pris en compte par le juge : le lieu de domiciliation, le travail ou encore la capacité d’insertion dans la société au sortir de détention. Est-ce qu’il y a un projet de sortie ? Est-ce qu’il y a un risque de réitération de l’infraction ?​, résume Juliette Chapelle.

3. Les requêtes de Cédric Jubillar ont-elles des chances d’aboutir ?

Sans commenter spécifiquement ce dossier, Juliette Chapelle estime que lors d’affaires criminelles, c’est quasiment mission impossible d’obtenir dans les 18 premiers mois la sortie de son client. On l’obtiendra plutôt en fin d’instruction, quand le juge estime qu’il a fini ses actes d’enquête. Et encore, dans les affaires criminelles, la plupart du temps, les personnes sont en détention provisoire jusqu’à leur comparution devant leur cour d’assises. C’est très rare qu’il y ait une remise en liberté, sauf lorsque le dossier est très bancal.

De plus, dans certains cas, la détention provisoire est aussi utilisée comme moyen de pression, pour obtenir la reine des preuves », ​l’aveu. Dans ces conditions de vie difficile, c’est un peu le bâton et la carotte : “Si tu avoues, peut-être que je te sortirais”.

4. Pourquoi autant de requêtes en si peu de temps

Pourquoi, alors, multiplier ces demandes ? Quatre ont été déposées ces neuf derniers mois. Plus le temps passe et plus on a de l’espoir qu’il soit remis en liberté​, a affirmé à l’AFP l’un de ses avocats, Alexandre Martin, pointant l’absence d’éléments probants ​pour le maintenir en détention.

Le peintre-plaquiste de 34 ans, écroué depuis le 18 juin 2021, nie toute implication dans la disparition de sa femme dont le corps n’a pas été retrouvé, et clame son innocence. Ces demandes sont fréquentes, estime Juliette Chapelle, surtout pour une personne qui clame son innocence. C’est logique, elle va avoir tendance à faire plus de demande de remise en liberté.

5. Ces requêtes sont-elles limitées en nombre ou dans le temps ?

Aucune limite n’est prévue par le Code de procédure pénale. C’est le droit le plus pur de toute personne mise en examen, son droit le plus strict. Il peut en faire autant qu’il veut​, détaille Maître Juliette Chapelle.

6. Combien de temps peut durer la détention, avant le procès ?

Une procédure de ce type pourrait durer au moins deux ans, deux ans et demi​, estime Juliette Chapelle. Le temps maximum en détention provisoire est de deux ans pour un crime inférieur à une peine de 20 ans de réclusion. La chambre de l’instruction, à titre exceptionnel, peut prolonger de deux fois quatre mois. Au-delà de 20 ans, ce délai monte à trois ans, avec là encore la possibilité pour la chambre de l’instruction de prolonger de 4 mois la période de détention, à deux reprises.

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