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25
January 2023

La responsabilité civile et pénale des personnes

La responsabilité civile et pénale des personnes

La responsabilité est, de manière générale, l’obligation pour une personne de répondre de certains actes qu’elle a commis.

Il existe en droit deux types de responsabilité : une personne peut engager sa responsabilité pénale ou civile. La responsabilité civile et pénale n’obéit pas au même régime juridique. 

I. LA RESPONSABILITÉ CIVILE

Une personne engage sa responsabilité civile lorsqu’elle vise à réparer un dommage qui a causé un préjudice à un tiers. La responsabilité civile est régie principalement par le Code civil.

Deux types de responsabilité civile existent. Ainsi, une personne engage sa responsabilité civile contractuelle lorsqu’elle n’exécute pas une obligation née d’un contrat conclu entre deux personnes. Trois éléments doivent alors être démontrés que sont une faute, un préjudice et un lien de causalité. Il convient tout d’abord d’établir que la personne a commis une faute par l’inexécution d’une obligation contractuelle, ou la mauvaise exécution d’un contrat. La faute doit ensuite avoir causé un préjudice à autrui.

La responsabilité délictuelle est, quant à elle, engagée sur le fondement d’une loi en l’absence de contrat. Trois conditions doivent également être réunies : un fait générateur, un dommage et un lien de causalité.

Ainsi, il convient tout d’abord de démontrer l’existence d’un fait générateur. Il existe différents faits générateurs, comme une faute personnelle, le fait des choses dont on a la garde et le fait d’autrui, qu’il s’agisse de ses enfants dans le cas des parents, ou des employés dans le cas des employeurs. La responsabilité civile peut donc naître soit du fait personnel, soit du fait des choses, soit du fait d’autrui. Les conditions suivantes sont proches de la responsabilité contractuelle. Doit ainsi être démontré le préjudice causé directement par le fait générateur.

Focus #1 : les différents types de faits générateurs
Les articles 1240 et 1241 du code civil (anciens articles 1382 et 1383) prévoient l’engagement de la responsabilité d’un auteur de son fait personnel si celui-ci cause un dommage. L’article 1242 du même code (ancien article 1384) permet la mise en jeu de la responsabilité pour un dommage causé à autrui, soit par une chose appartenant à l’auteur, et qui se trouve sous sa garde, soit par le fait d’autrui dans des situations particulières, notamment en cas d’action dommageable causé par un préposé ou un enfant. Dans ces cas, les responsables peuvent être condamnés à réparer le préjudice commis par le fait dommageable. En établissant un tel régime, le législateur a souhaité faciliter la réparation du préjudice des victimes. Les articles 1243 et 1244 du code civil (anciens articles 1385 et 1386) concernent quant à eux respectivement la responsabilité du fait des animaux et la responsabilité du fait des bâtiments.

La commission d’une faute entraîne la mise en œuvre de la responsabilité civile de la personne morale ou physique à l’origine de la faute. L’auteur a alors une obligation civile de réparer la victime du dommage qui résulte de sa faute. 

En cas de faute de la victime, l’auteur peut bénéficier d’une exonération totale ou partielle de sa responsabilité civile et pénale. 

II. LA RESPONSABILITÉ PÉNALE

A l’inverse, la responsabilité pénale vise à sanctionner un comportement qui constitue une infraction pénale et porte atteinte à l’ordre public. Elle est engagée sur le fondement du Code pénal, qui prévoit les peines applicables aux crimes, aux délits et aux contraventions. En vertu du principe d’interprétation stricte de la loi pénale, la responsabilité pénale n’existe que si elle est prévue par un texte de nature pénale. 

La responsabilité pénale suppose la réunion de deux éléments que sont la culpabilité et l’imputabilité. La culpabilité requiert une faute constitutive d’une infraction pénale, qui peut consister en une faute née de la négligence de l’auteur ou de son imprudence. L’imputabilité requiert quant à elle de démontrer que la faute a bien été commise par la personne qui engage sa responsabilité.

III. LE CUMUL DES RESPONSABILITÉS

Responsabilité civile et pénale peuvent être engagées simultanément. L’action est nécessairement engagée devant le juge pénal qui statue le plus souvent sur les deux objets : la condamnation pénale de l’auteur des faits et la réparation des dommages civils. Le procès pénal est ainsi souvent composé de deux actions. L’action publique initiée par le ministère public vise la condamnation pénale. L’action civile initiée par les victimes qui se constituent partie civile vise la réparation des dommages.

Le cas échéant, le juge civil statue uniquement sur la demande de réparation. Une personne victime de violences de la part d’un prévenu jugé au tribunal correctionnel peut par exemple engager la responsabilité civile de l’auteur des faits devant le juge civil afin de voir son dommage corporel être réparé. S’applique alors le principe de l’autorité absolue de la chose jugée au pénal sur le civil. Le juge civil est lié par la décision rendue par le juge pénal et ne peut aller à l’encontre de celui-ci. Ainsi, si l’auteur des faits n’est pas reconnu coupable des violences, le juge civil ne peut pas retenir de faute constituée par les violences et ne peut indemniser la victime.

En cas de commission d’une infraction, la responsabilité civile et pénale des personnes physiques et morales peut donc être engagée de façon concomitante.

IV. RESPONSABILITÉ PÉNALE DES PERSONNES PHYSIQUES OU MORALES

Le Code pénal permet d’engager la responsabilité civile et pénale des personnes physiques et, depuis 1994, celle des personnes morales.

A. La responsabilité pénale des personnes physiques

La responsabilité pénale des personnes physiques est une responsabilité personnelle invoquée à l’article 121-1 du code pénal : « Nul n'est responsable pénalement que de son propre fait ». Il résulte de cet article deux différences importantes avec la responsabilité civile. Tout d’abord, il ne peut exister en droit pénal de responsabilité du fait d’autrui, la responsabilité étant personnelle. Nul ne peut voir sa responsabilité engagée pour des faits commis par les autres, comme peut l’être en civil l’employeur pour des faits commis par ses salariés. La responsabilité pénale ne peut de plus être de plein droit, engagée malgré l’absence de faute de l’auteur des faits. La responsabilité pénale requiert une faute de son auteur.

B. La responsabilité pénale des personnes morales

Les personnes morales de droit privé peuvent également voir leur responsabilité engagée sur le fondement de l’article 121-2 du code pénal.

L’infraction doit tout d’abord avoir été commise par les personnes physiques qui disposent du pouvoir de direction de l’organisme personne morale. L’infraction est ainsi commise par le dirigeant ou un représentant de l’organisme comme un membre du conseil d’administration. Cependant, l’infraction doit être imputable à la personne morale : la faute a été commise pour le compte de la personne morale.

C. L’engagement de la responsabilité des personnes physiques agissant pour les personnes morales

1. Le dirigeant

L’engagement de la responsabilité pénale d’une personne morale n'exclut pas celle des personnes physiques, conformément à l’article 121-2 du Code pénal. Le dirigeant de l’entreprise voit ainsi sa responsabilité pénale personnelle être engagée en cas de faute personnelle. Les poursuites du représentant, personne physique, et de l’entreprise, personne morale, demeurent autonomes :  ainsi, la condamnation ou relaxe de l’une des deux personnes n’induit pas nécessairement le même jugement pour l’autre personne.

2. Les administrateurs

Selon le Code de commerce, les membres du conseil d’administration d’une société engagent leur responsabilité civile en cas de faute personnelle. Ils sont responsables envers la société ou les tiers pour toute violation à la loi, aux statuts de la société, ou pour des fautes de gestion (article L. 225-251 du code de commerce). Les administrateurs doivent de plus observer un devoir de loyauté consacré par la jurisprudence, dont le non-respect engage également leur responsabilité.

3. Les gérants d’une association

Les associations voient également leur responsabilité civile et pénale être engagée.

De nombreuses personnes comme les bénévoles, les usagers, les participants, les membres de l’association peuvent engager la responsabilité civile de l’association pour les dommages causés. L’association peut par exemple voir sa responsabilité contractuelle engagée lorsqu’elle manque à son obligation générale de sécurité. Sa responsabilité civile délictuelle peut quant à elle être engagée si l’association fait participer des mineurs de 18 ans sans recueillir d’autorisation parentale par exemple. La responsabilité civile d’une association est alors engagée selon le droit commun défini aux articles 1240 et 1241 du Code civil : ainsi doivent être réunis un fait générateur, un dommage et un lien de causalité.

De plus, une association peut voir sa responsabilité pénale engagée en tant que personne morale lorsque l’un de ses représentants a commis une infraction imputable à l’organisme entier. Le régime est alors celui de la responsabilité pénale des personnes morales de l’article 121-2 du Code pénal.

Les dirigeants de l’association peuvent également engager leur responsabilité propre. Les dirigeants sont les membres du conseil d’administration ou de tout autre entité qui dirige, de droit ou de fait, l’association. Leur responsabilité pénale est engagée pour des infractions personnelles, qu’il s’agisse de fautes à l’égard des tiers, d’infractions à la législation du travail ou des manœuvres financières comme le détournement de fonds.

V. LA DÉLÉGATION DE POUVOIRS

La délégation de pouvoirs est un moyen pour un dirigeant de s’exonérer de sa responsabilité des personnes qu’il a sous ses ordres. Elle permet à une personne dénommée le délégant de transférer une mission particulière et la responsabilité qui accompagne sa mise en œuvre à un délégataire.

Si la responsabilité civile et pénale peut parfois obéir à un régime d’exonération similaire, la délégation de pouvoirs ne transfère pas la responsabilité civile. Le délégant, la personne qui délègue, voit en effet sa responsabilité du fait d’autrui être engagée. Il doit répondre des fautes commises par ses préposés, personnes qui travaillent sous ses ordres conformément à l’article 1384 du Code civil.

Cependant, la délégation de pouvoirs entraîne le transfert de la responsabilité pénale du dirigeant de l’organisme sur le délégataire. Par exemple, un salarié qui a reçu une délégation pour la gestion financière peut être poursuivi pour fraude fiscale. La délégation ne transfère pas la responsabilité de la personne morale. Le principe de la délégation de pouvoir a été énoncé par Chambre criminelle le 11 mars 1993 :

« Sauf si la loi en dispose autrement, le chef d’entreprise, qui n’a pas personnellement pris part à la réalisation de l’infraction peut s’exonérer de sa responsabilité pénale s’il rapporte la preuve qu’il a délégué ses pouvoirs à une tierce personne pourvue de la compétence, de l’autorité et des moyens nécessaires. ».

Plusieurs conditions doivent être réunies pour que la délégation soit valide.

La délégation peut s’effectuer à l’égard de toute personne préposée, c’est-à-dire un salarié sous les ordres du délégant. Le salarié doit cependant détenir les compétences requises. La délégation ne saurait de plus être valide si le délégant ne met pas à disposition de son salarié les moyens nécessaires à l’accomplissement de la mission déléguée.

La délégation doit de plus porter sur un objet limité, une mission ou un service spécifique dans l’entreprise. Elle ne peut être trop large.

Elle ne requiert aucun formalisme particulier. Elle peut être explicite, par un acte écrit comme le contrat de travail, ou implicite. Elle est alors inhérente à la fonction occupée par un employé.

L’exonération de la responsabilité pénale ne joue de plus que sous certaines conditions. Le délégant ne doit pas s’être ingéré dans la mission qu’il a déléguée. Il ne sera sinon pas considéré comme étranger aux faits délictueux commis par son salarié. La charge de la preuve revient de plus au délégant qui doit prouver qu’il a effectivement délégué ses pouvoirs.

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