Le secteur de la petite enfance comprend les structures qui accueillent les enfants en bas âge : les crèches collectives, crèches d’entreprise, micro-crèches, haltes-garderies, jardins d’enfant, ou encore les structures multi-accueil. Quels que soient les modes d’accueil ou les structures d’accueil, les assistantes maternelles, les auxiliaires de puériculture, les éducateurs de jeunes enfants et toutes les personnes employées dans ce secteur peuvent voir leur responsabilité engagée.
Les agents territoriaux spécialisés des écoles maternelles (ATSEM) peuvent eux aussi être tenus responsables de dommages subis par des enfants dans certaines situations.
En votre qualité de parents ou futurs parents, inscrire votre enfant dans une structure d’accueil et le faire garder dans des structures municipales ou crèches inter-entreprises peut vous préoccuper. Cet article a pour vocation de vous montrer que l’admission d’un enfant dans une structure de garde n’est pas sans conséquence sur l’organisme d’accueil.
I. La responsabilité des professionnels de la petite enfance
Trois types de sanctions peuvent être infligés à une structure de petite enfance : des sanctions de police administrative, une condamnation civile et des sanctions pénales.
Les sanctions de police administrative visent les incidents contraires à l’ordre public. Elles entraînent la fermeture d’un établissement ou l’interdiction d’exercer d’un animateur par exemple. Ce dernier ne peut cependant se voir imposer des sanctions de police administrative que s’il n’agit pas dans le cadre de ses fonctions ou de ses missions : la responsabilité est sinon portée par la structure dans laquelle il travaille.
Pour tout incident, la responsabilité civile de l’établissement d’accueil est engagée. Qu’il s’agisse d’un enfant qui se blesse, de l’usage de matériel défectueux, de blessures entre enfants, la responsabilité civile de la structure est engagée. Cette responsabilité relève du régime de droit commun de la responsabilité défini à l’article 1240 du Code civil pour lequel doit être démontrée l’existence d’une faute, d’un préjudice et d’un lien de causalité. De même que pour les sanctions administratives, le professionnel de la petite enfance qui agit dans le cadre de ses missions peut se voir exonérer de sa responsabilité civile. Celle-ci repose en effet sur la structure ou l’employeur pour lequel le professionnel de la petite enfance exerce.
Cependant, si le dommage a été causé par une infraction pénale commise par un professionnel de la petite enfance dans l’exercice de ses missions, celui-ci voit sa responsabilité pénale engagée. La responsabilité pénale, contrairement à celle civile, est personnelle.
Les lieux d’accueil de jeunes enfants, tels que les crèches, garderies, haltes, jardins d’enfants ou les structures municipales en charge de l’épanouissement et de l’accueil des jeunes enfants, du développement de l’enfant, et de sa préparation à l’entrée à l’école maternelle, sont ainsi tenus au respect de certaines dispositions, qui ont pour objectif de s’assurer que les conditions d’accueil des enfants sont prévues en fonction de leurs besoins et de leur sécurité.
Être accueilli, y compris pendant les vacances scolaires, dans un centre de loisirs par exemple, nécessite en effet une vigilance particulière des spécialistes de la petite enfance. Ainsi, en cas d’accident, le nombre d’enfants prévu selon les possibilités d’accueil de l’organisme, et la qualité de l’accueil, notamment des enfants en situation de handicap, seront scrutés par les juridictions.

Tout professionnel de la petite enfance doit être vigilant au risque pénal car celui-ci s’est aggravé : le législateur étend considérablement les situations dans lesquelles un professionnel de la petite enfance peut voir sa responsabilité pénale être engagée. A titre d’exemple, l’organisateur qui ne déclare pas un centre de vacances, auteur auparavant d’une contravention, commet désormais un délit qui l’expose à une peine d’emprisonnement de deux ans et à une amende de 30 000 euros (article L 227-8 du code de l’action sociale et des familles)
Le personnel d’encadrement et de direction n’est pas responsable des infractions pénales de ses animateurs. En effet, « nul n’est responsable que de son propre fait » conformément à l’article 121-1 du Code pénal. Puisque la responsabilité pénale est personnelle, chaque professionnel de la petite enfance répond de ses propres fautes pénales personnelles, contrairement à la responsabilité civile.
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Une exception subsiste néanmoins en cas d’infractions non intentionnelles. Celles-ci sont retenues en cas de manquement au devoir de prudence et de sécurité. Or, le responsable de la structure est responsable de l’organisation globale des activités. Il demeure donc responsable pénalement des fautes de négligence ou de sécurité d’organisation. Si une activité de canoë est organisée, le responsable de la structure est responsable de l’organisation de l’activité bien qu’elle soit mise en œuvre par un animateur par exemple. Le responsable de la structure peut uniquement voir sa responsabilité pénale exonérée s’il délègue ses pouvoirs à l’animateur pour l’organisation spécifique de cette activité.
La responsabilité pénale des professionnels de la petite enfance peut être engagée pour tout type d’infraction. Ils sont cependant particulièrement exposés, du fait de leur profession, à certaines infractions. En outre, leur risque pénal est aggravé par le fait qu’ils travaillent avec des enfants : en effet, la peine est aggravée lorsque l’atteinte porte sur des personnes mineures.
II. La mise en danger d’un enfant
Plusieurs infractions définies aux articles 223-1 à 223-21 du Code pénal peuvent être retenues à l’encontre des professionnels lorsqu’ils ne prennent pas les mesures qui permettent de protéger les enfants qu’ils ont sous leur surveillance.
Tout d’abord, le professionnel de la petite enfance peut voir sa responsabilité pénale engagée s’il expose volontairement, par un manquement à une obligation de prudence ou de sécurité, un enfant à un risque de mort ou de blessures permanentes. Il peut alors être puni d’une peine d’un an d’emprisonnement et de 15 000 euros d’amende conformément à l’article 223-1 du Code pénal.
Les professionnels de la petite enfance peuvent également être sanctionnés s’ils délaissent un enfant qui n’est pas en mesure de se protéger de lui-même. Ils encourent alors une peine de cinq ans d’emprisonnement et de 75 000 euros d’amende selon l’article 223-3 du Code pénal. Récemment, un enfant de 2 ans a été retrouvé dans la rue en body et en chausson alors qu’il était sous la supervision de la crèche.

Les professionnels de la petite enfance peuvent être incriminés pour entrave à assistance ou omission de porter secours. C’est le cas de la non-assistance à personne en péril punie de cinq ans d’emprisonnement et de 75 000 euros d’amende en vertu de l’article 223-6 du Code pénal. Il faut pour cela démontrer que le professionnel de la petite enfance avait connaissance du péril dans lequel l’enfant résidait et ne l’a volontairement pas empêché. Cette infraction ne peut résulter uniquement de la négligence, imprudence, ou d’une erreur d’appréciation.
III. L’atteinte à l’intégrité physique ou psychique de l’enfant
La responsabilité des professionnels de la petite enfance peut également être retenue pour homicides et blessures volontaires ou involontaires.
Cette infraction est constituée de quatre éléments constitutifs. Tout d’abord, l’enfant doit avoir subi un préjudice corporel ou psychologique. Doit également être établie la faute de l’animateur. La faute est caractérisée en cas de manquement à une obligation de prudence ou de sécurité. Il faut ensuite prouver le lien de causalité entre la faute et le dommage subi par l’enfant. Une dernière condition est celle de l’imputabilité. Il convient de rechercher si la personne responsable est bien la personne qui a commis la faute. En effet, la responsabilité n’est pas retenue si le professionnel de la petite enfance a accompli les diligences normales de sa mission et que l’incident survient de par la faute exclusive de la victime ou du fait d’un cas de force majeure.
Le professionnel de la petite enfance responsable d’un homicide involontaire encourt alors trois ans d’emprisonnement et de 45 000 euros d’amende au regard de l’article 221-6 du Code pénal. La peine est portée à 5 ans et 75 000 euros d’amende s’il a manifestement violé volontairement une obligation de prudence ou de sécurité.
Les cas de violences ou d’homicide volontaire se retrouvent généralement dans les hypothèses du bébé secoué ou d’atteintes volontaires telles que l’ingestion de produits dangereux. Ainsi, une auxiliaire de puériculture a été récemment mise en cause dans l’ingestion d’eau de javel par un bébé de 11 mois dans une crèche à Lyon.
Comme toute personne exerçant une activité professionnelle dans les structures de la petite enfance, un agent territorial spécialisé de l’école maternelle peut voir sa responsabilité pénale engagée en cas de violences commises sur les enfants accueillis.
L’importance de l’accueil de l’enfant dans son développement, que ce soit à temps complet, sur des demi-journées, ou de façon ponctuelle, justifie la particularité de la répression de ces comportements.
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IV. Le secret professionnel
Un professionnel de la petite enfance peut également se voir incriminé pour divulgation du secret professionnel. Il ne peut divulguer des informations privées que lui révèle un enfant.
La révélation d’un secret professionnel est une infraction pénale qui expose son auteur à une sanction d’un an d’emprisonnement et de 15 000 euros d’amende en vertu de l’article 226-13 du Code pénal.
Si la divulgation de la vie privée de l’enfant l’expose, lui ou sa famille, à un risque d’atteinte à la personne, l’auteur des faits s’expose, outre le manquement du secret professionnel, à une peine de cinq ans d’emprisonnement et de 75 000 euros au regard de l’article 223-1-1 du Code pénal.
La loi prévoit néanmoins des exceptions. Le professionnel de la petite enfance doit différencier les informations qui impactent sa structure et doivent être partagées avec ses collègues (comme un enfant qui a envie de vomir) des informations privées sur la vie de l’enfant qu’il doit garder pour lui.
Le principe d’assistance à personne en danger prime le secret professionnel : il convient de révéler celui-ci lorsqu’une personne est en danger. De plus, doit être révélé le secret qui contrevient à l’ordre public, tel qu’un crime. Il s’agit ici d’un secret qui dépasse le cadre de la structure petite enfance et doit être rapporté aux autorités compétentes.
Ainsi, la non-dénonciation de crime constitue une entrave à la justice punie de trois ans d’emprisonnement et de 45 000 euros au regard de l’article 434-1 du Code pénal. La non-dénonciation de sévices, mauvais traitements ou agressions infligés à un mineur est punie de la même peine en vertu de l’article 434-3 du Code pénal.
V. La discrimination
Enfin, un professionnel de la petite enfance peut faire l’objet de poursuites pour pratiques discriminatoires définies à l’article 225-1 du Code pénal. Trois éléments doivent être étudiés pour retenir cette infraction. Tout d’abord, la discrimination constitue une différence de traitement opéré en fonction d’un critère discriminatoire. La loi retient à l’article 225-1 du Code pénal 23 motifs de discriminations tels que l’âge, l’apparence physique, l’orientation sexuelle, le handicap. D’autre part, un acte précis doit être relevé. Il peut s’agir du refus d’accueillir un enfant, de le laisser effectuer une activité ou de lui donner du matériel autorisé pour les autres enfants. Enfin, certains faits justificatifs exonèrent l’auteur des faits de sa responsabilité. Ainsi, des différences effectuées en fonction du sexe peuvent être considérées justifiées si elles visent à promouvoir l’égalité des sexes ou à protéger les victimes de violences sexuelles notamment. Un professionnel de la petite enfance encourt également une peine aggravée puisque ses agissements sont effectués dans un lieu accueillant du public, circonstance aggravante en vertu de l’article 225-2 du Code pénal. Il est donc puni d’une peine de 5 ans d’emprisonnement et de 75 000 euros d’amende.
VI. Les délits spécifiques aux professionnels de la petite enfance
A ces infractions pénales de droit commun s’ajoutent des infractions spécifiques aux organisateurs de de séjours de vacances et accueils de loisirs.
Cinq infractions sont ainsi définies à l’article L227-8 du Code de l’action sociale et des familles. Ainsi, sont punies de six mois d’emprisonnement et de 3750 euros d’amende le fait de ne pas déclarer un séjour ou un accueil de loisirs, ne pas déclarer des modifications apportées à l’accueil et ne pas avoir souscrit d’assurance. Également, s’opposer à l’action d’un agent public chargé d’une mission, de contrôle des lieux par exemple, est puni d’un an d’emprisonnement et de 7500 euros d’amende. Enfin, puni de deux ans d’emprisonnement et de 30 000 euros d’amende le fait d’exercer des fonctions relatives à l’accueil des mineurs en dépit d’une incapacité et de ne pas exécuter les décisions préfectorales.
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