24
July 2023
Articles
Articles

Le risque pénal des influenceurs et des agences

Plusieurs affaires ont récemment éclaté dans le monde de l’influence, et de plus enplus de comportements d’influenceurs sont mis en lumière comme délictuels.

Cet article a pour objectif d’expliquer le risque pénal qui pèse sur les épaules des influenceurs, et de détailler les infractions que la justice pénale peut être amenée à sanctionner.

I. Qu’est-ce qu’un influenceur ?

Il n’existe pour le moment aucune définition législative de l’influenceur.

Des débuts de définition commencent néanmoins à apparaître.

L’Autorité de régulation professionnelle de la publicité (ARPP)considère qu’un influenceur

« est un individu exprimant un point de vue ou donnant des conseils, par écrit, audio et/ou visuel, dans un domaine spécifique et selon un style ou un traitement qui lui sont propres et que son audience identifie. »

La cour d’appel de Paris a quant à elle définit l’influenceur comme

« une personne active sur les réseaux sociaux, qui par son statut, sa position ou son exposition médiatique est capable d’être un relais d’opinion influençant les habitudes de consommation dans un but marketing. »

{{cta-rendez-vous="/cta"}}

II. Quelles sont les pratiques punissables ?

L’influenceur s’expose à plusieurs risques d’un point de vue pénal, et peut se voir infliger des sanctions, en fonction des infractions commises.

Les influenceurs font l’objet de plus en plus de plaintes, notamment par des associations telles que le collectif d’aide aux victimes d’influenceurs (AVI).

Une personne victime de comportements illégaux peut choisir la voie pénale, mais également la voie civile, et réclamer la réparation de son préjudice sur le fondement de l’article 1240 du code civil notamment.

Si la victime d’une infraction commise par un influenceur choisit d’aller devant les juridictions pénales et de se constituer partie civile, toute condamnation pourra donner lieu à des amendes, mais également au versement de dommages et intérêts à son égard.

L’ARPP, organisme de régulation professionnelle de la publicité, publie régulièrement des recommandations, dont certaines sont destinées aux influenceurs.

A. Les délits de droit commun

Comme toute personne, l’influenceur peut se rendre coupable d’un certain nombre d’infractions de droit commun délits : l’escroquerie, l’abus de confiance, l’abus de faiblesse.

L’escroquerie,puni par l’article 313-1 du code pénal, consiste en l’obtention par l’auteur de l’escroquerie d’un bien, d’un service ou d'argent par l’usage d’une tromperie (manœuvres frauduleuses par exemple). Elle est punie de cinq ans de prison et de 375 000 euros d’amende.

Paul Anthony, alias PA7, a par exemple été condamné à cinq ans d’emprisonnement pour escroquerie. Il a notamment été condamné pour avoir recruté de faux auto-entrepreneurs sur les réseaux sociaux et avoir rempli des formulaires falsifiés afin d’obtenir des aides aux entreprises mises en place dans le cadre de la crise de coronavirus.

Des influenceurs ont également fait l’objet de plaintes et de condamnations pour abus de confiance, situation dans laquelle la victime remet de l’argent ou un bien à l’auteur de l’infraction, qui détourne son usage pour son profit ou en faire un usage frauduleux.

Plusieurs personnes, soutenues par l’AVI, ont notamment déposé plainte contre Dylan Thiry, influenceur, pour abus de confiance. Les plaignants lui reprochent diffusé des cagnottes en ligne censées financer des missions humanitaires, mais d’avoir manqué de transparence sur l’usage véritable des fonds.  

L’abus de faiblesse, puni à l’article 223-15-2 du code pénal, est le fait d'abuser d'une personne en profitant de son ignorance ou de sa faiblesse physique ou mentale. Il peut être puni de 375 000 euros d’amende.

L’influenceur Thierry Casasnovas, influenceur connu pour son crudivorisme, a été mis en examen pour exercice illégal de la médecine, mais également abus de faiblesse, pour avoir conseillé dans ses vidéos de manger cru et de pratiquer l’abstinence, notamment pour guérir le cancer, le diabète ou la dépression.

Le droit pénal des affaires prévoit ainsi un certain nombre d’incriminations applicables au comportement des influenceurs.

B. Les pratiques commerciales trompeuses

Un influenceur s’expose également à des poursuites pénales pour pratiques commerciales trompeuses, en particulier dans le cadre de sa communication au public.

La Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes(DGCCRF) enquête sur les pratiques commerciales des influenceurs et vérifie le respect de la réglementation sur la publicité,les droits des consommateurs et la promotion des produits. Elle peut imposer des sanctions en cas de non-respect de cette réglementation.

Une pratique commerciale est considérée déloyale, ou trompeuse, lorsqu'elle est contraire aux exigences de la diligence professionnelle et qu'elle altère ou est susceptible d'altérer de manière substantielle le comportement économique du consommateur normalement informé et raisonnablement attentif et avisé, à l'égard d'un bien ou d'un service (article L120-1 du code de la consommation).

Les pratiques commerciales trompeuses sont punies d'un emprisonnement de deux ans et d'une amende de 300 000 euros.

Le code pénal liste plusieurs types de comportements susceptibles de caractériser une pratique commerciale trompeuse, par exemple lorsqu’ils reposent sur des allégations, indications ou présentations fausses ou de nature à induire en erreur.

Pour les influenceurs, tel est le cas du défaut d’identification du caractère commercial des publications vis-à-vis du public. Tel est également le cas de publications commerciales reposant sur des allégations fausses.

L’article 20 de la loi de 2004 pour la confiance dans l’économie numérique prévoit ainsi que « toute publicité, sous quelque forme que ce soit, accessible par un service de communication au public en ligne, doit pouvoir être clairement identifiée comme telle. »

L’influenceuse Nabilla Benattia-Vergara a ainsi été condamnée pour pratiques commerciales trompeuses à une amende transactionnelle de 20 000 € pour avoir promu sur Snapchat un site de formation au trading en ligne, en omettant de mentionner qu’elle était rémunérée pour cette publicité.

L’agence d’influenceurs Shauna Events, l’une des principales agences françaises fondée par Magali Berdah, a également fait l’objet d’une plainte déposée par le rappeur Booba pour pratiques commerciales trompeuses, ayant donné lieu à l’ouverture d’une enquête.

C. La concurrence déloyale

La concurrence déloyale comprend plusieurs comportements préjudiciables,tels que le dénigrement, la désorganisation d’une entreprise concurrente, le parasitisme économique, ou encore la confusion.

Les influenceurs peuvent s’exposer à des risques pénaux, pour dénigrement, qui constitue en la divulgation d’informations susceptibles de jeter le discrédit sur une autre entreprise.

L’influenceur Cyprien, ainsi que sa société ADCI, ont ainsi été condamnés à payer 18 000€ pour avoir dénigré sur Twitter Madame Sandra Szaja et son nouveau magazine, en écrivant sur le réseau social « C’est quoi cette merde ? Il faut vite le jeter dans le feu ».

D. Lacontrefaçon

La contrefaçon consiste à reproduire une marque, un brevet, un dessin, un modèle ou une œuvre, sans l’autorisation du titulaire des droits.

La détention et la vente de produits contrefaits constituent des délits, punis de trois ans d’emprisonnement et de 300 000 euros€d’amende.

Dans leur pratique, les influenceurs peuvent être amenés à faire la publicité de produits contrefaits et s’exposent alors à des sanctions pénales.

{{cta-contact="/cta"}}

III. Focus sur la nouvelle proposition de loi visant à encadrer l’influence commerciale et à lutter contre les dérives des influenceurs sur les réseaux sociaux 

Une proposition de loi a très récemment été déposée le 1er février 2023, et a été adoptée le 30 mars dernier par l’Assemblée nationale. Elle vise à encadrer les pratiques des influenceurs et de leurs agents, de plus en plus dénoncées comme dangereuses si elles ne sont pas encadrées. N’étant pas encore promulguée, elle n’est pour le moment pas applicable.

Le 9 mai 2023, le Sénat a adopté à l’unanimité la proposition de loi, malgré quelques modifications. Les députés et sénateurs doivent désormais se réunir en commission mixte paritaire pour se mettre d’accord sur la version finale du texte de loi.

La loi devrait donc être promulguée prochainement.

Le texte de loi, tel que modifié dernièrement par le Sénat, crée tout d’abord une définition légale de la notion d’influenceur, qui serait définie comme

« les personnes physiques ou morales qui, à titre onéreux, mobilisent leur notoriété auprès de leur audience pour communiquer au public par voie électronique des contenus visant à faire la promotion,directement ou indirectement, de biens, de services ou d’une cause quelconque en contrepartie d’un bénéfice économique ou d’un avantage en nature exercent l’activité d’influence commerciale par voie électronique. »

L’activité d’agent d’influenceur consiste quant à elle à représenter ou à mettre en relation, à titre onéreux, les personnes physiques ou morales exerçant l’activité d’influence commerciale par voie électronique avec des personnes physiques ou morales dans le but de promouvoir, à titre onéreux, des biens, des services ou une cause quelconque.

Le nouveau texte prévoit également l’interdiction de promouvoir certains produits sous peine de sanctions pénales, notamment les actes portant atteinte à la protection de la santé publique, tels les actes de chirurgie esthétique, certains produits et services financiers, et les contrefaçons.

Il est par ailleurs prévu d’encadrer la pratique du dropshipping,qui consiste en la vente sur internet d’un produit dans laquelle le vendeur ne se charge que de la commercialisation et de la vente, tandis que le fournisseur expédie lui-même la marchandise au consommateur. Cette pratique peut en effet fréquemment conduire à la vente de produits de mauvaise qualité, contrefaits,ou jamais livrés.

Les influenceurs auront donc l’obligation de s’assurer de la disponibilité des produits et de leur licéité, et en particulier qu’il ne s’agit pas de produits contrefaisants.

La nouvelle proposition de loi vise également à encadrer certaines pratiques d’influenceurs mineurs.

Enfin, si la proposition de loi est définitivement adoptée, les influenceurs et leurs agents seront obligés de rédiger un contrat écrit pour encadrer leur relation commerciale.

Le législateur souhaite sanctionner les dérives de la pratique de l’influence, aussi bien vis-à-vis des influenceurs,qui peuvent vouloir contourner la loi en violation de leurs obligations, que de leurs agences, en tant que personnes morales. Il est dès lors probable que des infractions spécifiques naissent pour quel’influenceur qui commet un délit puisse être poursuivi au pénal.

{{cta-news="/cta"}}

sign
Envie d'aller plus loin ? Contactez-nous

Nous sommes impatients de vous rencontrer afin de vous apporter des solutions adaptées à votre situation pénale.

Merci pour votre message, nous allons revenir vers vous très prochainement.
Un souci vient de se produire, veuillez renouveler l'opération.
sign
Contact us for further information

We look forward to meeting you and providing you with solutions tailored to your criminal situation.

Thank you for your message, we will get back to you very soon.
A problem has occurred, please try again.