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February 2023

Personne détenue : comment sortir de détention provisoire ?

Personne détenue : comment sortir de détention provisoire ?

I. Qu'est-ce que la détention provisoire ? 

La détention provisoire est l’emprisonnement d’une personne qui n’a pas encore été jugée. Toute personne mise en examen pour une infraction punie de trois ans d’emprisonnement ou plus peut être détenue provisoirement, en vertu de l’article 143-1 du Code de procédure pénale (CPP). Ainsi, outre les conditions de fond, relatives aux soupçons dont fait l’objet la personne placée en détention, l’infraction visée doit être punie d’une peine de prison égale ou supérieure à trois ans. Une personne qui ne respecte pas le contrôle judiciaire ou l’assignation à résidence dont elle doit s’acquitter peut également être placée en détention provisoire

Le placement en détention provisoire résulte tout d’abord d’une ordonnance du juge d’instruction aux fins de saisir le juge des libertés et de la détention (JLD). Ce dernier décide du placement en détention provisoire. Il reçoit pour cela le mis en examen, obligatoirement assisté d’un avocat, au cours d’une audience contradictoire. Le JLD rend alors une ordonnance pour ordonner le placement en détention provisoire. Le mis en examen part immédiatement en prison. Le juge d’instruction donne son avis sur l’intérêt d’un placement en détention. La personne peut être détenue pour éviter qu’elle puisse s’entretenir avec ses coauteurs ou complices par exemple. 

La détention provisoire ne peut être ordonnée qu’à certaines conditions. Si celles-ci ne sont pas remplies, aussi bien en matière correctionnelle qu’en matière criminelle, la personne ne peut être maintenue en détention. Ces règles ont pour objectif de protéger la personne mise en examen, toujours présumée innocente, qui peut être assistée d’un avocat. 

Dans certains cas, la personne remise en liberté peut être soumise à une mesure d’assignation à résidence avec surveillance électronique.

En cas de détention illicite (non-lieu, relaxe ou acquittement), les personnes qui ont été placées en détention provisoire peuvent demander à être indemnisées pour leurs préjudices, souvent aggravés par les conditions de détention en maison d’arrêt. Il faut alors adresser une demande au premier président de la cour d'appel du lieu où la décision a été prononcée. Si la décision est insatisfaisante, il est possible de déposer un recours contre la décision du premier président, dans les dix jours, devant la Commission nationale de réparation des détentions.

 

II. Comment sortir de la détention provisoire dans le cadre d'une instruction 

A. Faire appel de l’ordonnance initiale de placement en détention provisoire

Le détenu peut tout d’abord faire appel de l’ordonnance de placement du JLD, en vertu de l’article 186 du Code de procédure pénale. Il dispose de dix jours après la notification de l’ordonnance pour interjeter appel auprès du greffe de l’établissement pénitentiaire. La requête est alors examinée par la chambre de l’instruction.

Pour contester la décision initiale, le détenu doit faire valoir qu’aucune des conditions de placement en détention provisoire énumérées à l’article 144 du Code de procédure pénale n’est remplie :

  • Conserver les preuves ou indices
  • Empêcher une pression sur les témoins, victimes ou une concertation frauduleuse
  • Protéger la personne mise en examen
  • Garantir le maintien de la personne mise en examen à la disposition de la justice
  • Mettre fin à l’infraction ou à un trouble de l’ordre public

B. Demander une remise en liberté

Le détenu peut demander sa remise en liberté à tout moment. Il doit pour cela remplir un formulaire auprès du greffe de l’établissement pénitentiaire. Le détenu peut être remis en liberté lorsque les conditions évoquées par les articles 144 et 144-1 du code de procédure pénale ne sont plus réunies.

Le juge d’instruction communique la demande de remise en liberté auprès du procureur de la République qui transmet ses réquisitions. Le juge d’instruction dispose alors de 5 jours pour prendre sa décision. Il saisit le JLD uniquement s’il décide de prolonger la détention provisoire. Le JLD dispose alors de trois jours pour rendre sa décision, sans organiser cette fois-ci une audience.

Si le JLD refuse de même la remise en liberté, le détenu peut faire appel de sa décision. La demande de remise en liberté est alors examinée par la chambre de l’instruction de la cour d’appel.

C. Demander une sortie exceptionnelle

À tout moment de la détention provisoire, la personne mise en examen peut demander une sortie exceptionnelle. Le juge d’instruction peut ainsi accorder une autorisation de sortie provisoire sous escorte. En cas de refus, le détenu peut faire appel auprès de la chambre de l’instruction.

 

D. Contester le prolongement de la durée de la détention provisoire

1. Pour un délit

Pour un délit, la durée initiale de la détention provisoire est de 4 mois. A l’issue de ce délai, elle peut être prolongée deux fois pour une durée de 4 mois à chaque fois.

Pour cela, une audience se tient devant le JLD au cours de laquelle le détenu, accompagné de son avocat, est entendu.

Le détenu peut tout d’abord démontrer que les conditions de prolongation du placement en détention provisoire, qui sont les mêmes que pour la décision initiale soit l’article 144 du CPP, ne sont plus remplies.

Le détenu peut également démontrer que les conditions de l’article 144-1 ne sont pas réunies. La détention provisoire ne peut en effet excéder une durée raisonnable appréciée selon deux éléments que sont la gravité des faits reprochés à la personne mise en examen et la complexité des investigations qu’il reste à réaliser.

Si le JLD prononce tout de même la prolongation de la détention provisoire, le détenu peut faire appel de l’ordonnance.

La prolongation de la détention provisoire est cependant limitée.

Tout d’abord, la détention provisoire ne peut être prolongée au-delà de 4 mois lorsque la personne n’a pas été condamnée à une peine supérieure à 1 an et le quantum de la peine est de moins de 5 ans.

De plus, la prolongation de la détention provisoire ne peut excéder un an. Elle peut cependant être portée à deux ans si un fait constitutif de l’infraction a été commis hors de France ou si l’infraction punie est punie par 10 ans d’emprisonnement.

2. Pour un crime

Si, en matière criminelle, la durée de la détention provisoire légale est plus longue qu’en cas de commission d’un délit, les personnes placées en détention provisoire doivent être remises en liberté à l’expiration d’un certain délai. 

Dans certains cas, des circonstances aggravantes peuvent rallonger le délai. À titre d’exemple, un vol en bande organisée est considéré comme un crime, et la durée de la détention provisoire est alors allongée. 

La durée initiale de la détention provisoire est d’un an. A l’issue de ce délai, elle peut être prolongée tous les six mois.

La procédure de prolongation est la même que pour les délits. Le détenu est entendu, accompagné de son avocat, au cours d’un débat contradictoire devant le JLD. Il peut démontrer que les conditions de l’article 144 du code de procédure pénale ne sont plus remplies, ou que celles de l’article 144-1 du code de procédure pénale ne sont pas réunies. Le détenu peut ensuite faire appel de l’ordonnance du JLD lorsque celui-ci décide de prolonger la détention.

En outre, la prolongation de la détention provisoire ne peut excéder une durée maximale. 

Le mis en examen pour un crime puni par une peine d’emprisonnement inférieure à 20 ans ne peut être détenu provisoirement plus de deux ans. La durée est portée à trois ans lorsque des faits constitutifs de l’infraction ont été commis hors de France. 

En cas de crimes graves ou multiples, tels que des meurtres, viols, infractions de trafic de stupéfiant ou de terrorisme, la durée maximale de la détention provisoire est de 4 ans.

Enfin, en vertu de l’article 146 du code de procédure pénale, s’il apparaît au cours de l’instruction que la qualification de crime n’est pas retenue, le juge d’instruction peut ordonner la remise en liberté du détenu ou saisir le JLD pour qu’il maintienne la détention. 

III. COMMENT SORTIR DE LA DÉTENTION PROVISOIRE DANS LE CADRE D’UNE COMPARUTION ?

La détention provisoire peut également être prononcée dans le cadre d’une comparution immédiate, d’une comparution à délai différé ou d’une comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité.

En cas de renvoi d’une audience, le tribunal correctionnel peut ordonner le placement ou le maintien en détention provisoire du prévenu jusqu'à sa prochaine comparution.

A. Comparution immédiate

Lorsque la comparution immédiate ne peut se tenir à l’issue de la garde à vue, la personne peut être détenue provisoirement à la demande du procureur de la République. Ce dernier saisit le JLD qui décide de la détention provisoire après avoir entendu le détenu et son avocat. Le détenu doit alors démontrer qu’aucune des conditions de l’article 144 n’est remplie. Néanmoins, si le JLD rend une ordonnance de placement en détention provisoire, le détenu ne peut faire appel. L’audience de comparution immédiate doit alors se tenir dans les trois jours ouvrables. Si elle se tient à une date ultérieure, le détenu est remis en liberté jusqu’à l’audience.

B. Comparution à délai différé

Cette procédure permet au procureur de la République de repousser l’audience de jugement jusqu’à deux mois après la garde à vue. L’intéressé peut être mis en détention uniquement s’il est mis en cause pour un délit puni d’une peine d’emprisonnement de trois ans ou plus. Le procureur de la République saisit le JLD qui rend son ordonnance après un débat contradictoire avec le mis en cause et son avocat. Il s’agit pour le mis en cause de démontrer qu’aucune des conditions de l’article 144 n’est remplie. Si le JLD ordonne la détention, le mis en cause dispose de 10 jours pour interjeter appel auprès du greffe de l’établissement pénitentiaire. Si la personne mise en cause n'est pas remise en liberté, elle doit être jugée dans les deux mois suivants.

C. La comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité (CRPC)

Dans cette procédure, la personne mise en cause reconnaît sa culpabilité et se voit proposer une peine par le procureur de la République. Elle peut demander un délai pour réfléchir à la peine proposée. Si la peine proposée est une peine d’emprisonnement de plus de deux mois, le procureur peut demander le placement en détention provisoire durant le délai de réflexion.

Le procureur saisit de même le JLD qui, ayant écouté le mis en cause et son avocat, décide de la mise en détention par une ordonnance. Le détenu ne peut faire appel mais est nécessairement remis en liberté si le procès n’a pas lieu dans les 20 jours qui suivent la mise en détention.

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