Boite à outils
28
June 2023

Obligation de sécurité du restaurateur et responsabilité pénale

Obligation de sécurité du restaurateur et responsabilité pénale

Bonjour à vous 👋

Merci de suivre Whisper, votre boîte à outils de gestion du risque pénal et bienvenue pour cette édition #12.

Les entreprises privées ne sont clairement pas habituées à la culture de la gestion de crise, encore moins les solopreneurs, les TPE, les PME et les startups. Pourquoi ? Pour des questions de temps et de budget mais pas que. Il y a aussi cette petite voix qui vous dit : "allez, ça arrive qu'aux autres. Tu n'es pas un délinquant, t'inquiète, le risque pénal, ça ne te concerne pas". Et pourtant, le risque pénal nous concerne tous.Mon but ? Vous proposer des conseils, des outils et des process pour que tu puisses anticiper, prévoir et passer la vague de la crise 🎯Si vous venez d'arriver, vous pouvez retrouver toutes les Whisper ici.

Si vous voulez aller plus loin, vous pouvez aussi :

👉 Découvrir nos services en gestion du risque pénal et en défense pénale

👉 Découvrir nos guides publiés sur la gestion du risque pénal du restaurateur et le guide sur la gestion d'une crise cyber

👉 Me suivre sur Linkedin, Twitter et Instagram

Vais-je ressortir vivante de ce repas ?


C'est la question que je me suis posée la semaine dernière.

J'organise un petit cocktail et fais appel à une personne que j'avais rencontrée dans le cadre d'un atelier sur la gestion du risque pénal animé par mes soins au sein d'un incubateur de futurs restaurateurs.

J'ai été déçue. Pourquoi ? Car je retrouve une vis au fond d'un dessert, qui se retrouve donc dans ma bouche.

J'envoie un e-mail à cette personne avec la photographie de la vis, en lui disant que tout était très bon mais qu'on avait rencontré un petit problème technique dans un des desserts. Ne voulant pas prendre de risque, nous avions décidé de jeter le reste. À titre personnel, je n'ai aucune envie qu'un de mes invités se retrouve à l'hôpital car il a ingéré un élément qui n'aurait pas dû être là. Retrouver cette vis est aussi un signe du manque d'hygiène dans les cuisines de ce restaurant...

Bref, j'ai été stupéfaite par la réaction de cette personne qui m'a tout simplement dit que je mentais car :

  • Je ne l'avais pas appelé tout de suite
  • La vis était propre
  • Il y avait 1 carton devant ma porte donc c'était peut-être moi qui avais mis la vis au fond du dessert...

D'un naturel positif et enthousiaste (et il en faut quand on pratique la matière pénale), j'ai décidé de tirer quelque chose de cette malheureuse expérience.

Au menu, votre chef vous propose donc :

Entrée

Crudités de bonne humeur, d'empathie et de compréhension pour votre client

Repas

Ragoût d'infractions pénales et de conséquences en cascade

Dessert

Tarte d'anticipation du risque pénal

Allez, à table !

1/ Entrée

Crudités de bonne humeur, d'empathie et de compréhension pour votre client

Cela fait 10 ans que j'ai prêté serment. J'ai été collaboratrice pendant 3 ans et demi au sein du département de contentieux des affaires du cabinet d'affaires américain Cleary Gottlieb Steen & Hamilton. Assez rapidement, j'ai eu 2 envies : me concentrer sur le droit pénal et créer ma structure. Je sentais que j'avais envie d'être avocate et entrepreneuse, pouvoir m'entourer des personnes avec qui j'ai envie de travailler, être dévouée aux clientes et clients qui me font confiance... Bref, sauter en parachute sans parachute. C'est ce que j'ai fait en septembre 2016.


Cela fait donc 7 ans que j'ai ma structure, qui se porte bien, avec des clientes et des clients qui nous font confiance pour les défendre. J'en suis honorée. Je me sens légitime également pour dire que se tromper, faire des erreurs, ça arrive, même aux meilleurs d'entre nous.


Cette personne aurait pu tout simplement s'excuser, effectuer des vérifications pour savoir où il y a eu une erreur et ça suffisait. Ça m'aurait rassuré en me disant que personne ne tombera sur une vis dégoûtante dans un plat confectionné par ses soins.


Mais ça ne s'est pas passé comme cela, vous l'avez compris.

Alors, juste un rappel pour vous : si vous trouvez qu'on se trompe, qu'on a fait une erreur, que vous auriez aimé si ou ça, dites-le moi. Ma porte sera toujours ouverte pour mes clientes et clients avec pour seul but : vous satisfaire toujours plus, vous apporter une expérience client toujours plus satisfaisante et une défense toujours plus efficace.

Pourquoi ? Parce que mon seul but dans ce travail, c'est vous !

2/ Plat

Ragoût d'infractions pénales et de conséquences en cascade

A titre liminaire, on rappellera que le restaurateur / traiteur est soumis à une obligation de sécurité de résultat.

En clair, il n'a pas le choix : le client doit être sain et sauf à l'issue du repas. Il ne doit pas ressortir les pieds devant, ou en se roulant par terre avec un mal de ventre, ou avec 3 dents en moins.

Maintenant que c'est la base est posée, revenons au droit pénal, mon amour.
Alors, quelles sont les infractions envisageables si vous retrouvez une vis dans votre plat ?

En premier lieu, en cas de décès du client, on pourra viser l'homicide involontaire, prévu à l'article 221-6 du code pénal. En clair, l'homicide involontaire, c'est le fait de causer par maladresse, imprudence, inattention, négligence ou manquement à une obligation de prudence ou de sécurité imposée par la loi ou le règlement, la mort d'autrui. L'homicide involontaire, ça coûte jusqu'à 5 ans d'emprisonnement et jusqu'à 75 000 euros d'amende. À cela, il faut ajouter les dommages et intérêts à payer à la famille de la victime.

En deuxième lieu, si le client ne décède pas, on peut envisager les blessures involontaires prévues à l'article 222-19 du code pénal. Les blessures involontaires sont le fait de causer à autrui par maladresse, imprudence, inattention, négligence ou manquement à une obligation de prudence ou de sécurité imposée par la loi ou le règlement, une incapacité totale de travail pendant plus de trois mois. Selon les circonstances, la commission de blessures involontaires coûte jusqu'à 3 ans d'emprisonnement et jusqu'à 45 000 euros d'amende.

En troisième lieu, le restaurateur pourrait être poursuivi pour mise en danger de la vie d'autrui prévu par l'article 223-1 du code pénal. La mise en danger de la vie d'autrui est le fait d'exposer directement autrui à un risque immédiat de mort ou de blessures de nature à entraîner une mutilation ou une infirmité permanente par la violation manifestement délibérée d'une obligation particulière de prudence ou de sécurité imposée par la loi ou le règlement. Cette infraction est punie d'un an d'emprisonnement et de 15 000 euros d'amende.

Enfin, il existe toute une série d'infractions au code de la consommation, notamment le délit de pratiques commerciales trompeuses, pour lequel les sanctions peuvent aller jusqu'à 2 ans d'emprisonnement et 300 000 euros d'amende.

Je pense que vous l'avez compris, le risque pénal n'est pas un petit risque à prendre à la légère. On vient de le voir, il engage la santé et la vie des clients des restaurateurs et des traiteurs.

Toutefois, le risque zéro n'existe pas. Alors que fait-on ?

3/ Dessert

Tarte d'anticipation du risque pénal

Pour maîtriser un risque, rien de mieux que de l'anticiper.

Déjà, on peut appliquer les 3 règles d'or sur la sécurité alimentaire :


1/ Il faut appliquer des règles d'hygiène irréprochables dans le local, concernant le matériel, les équipements, le stockage des aliments et auprès du personnel. Ces règles doivent être connues du personnel, mises en application avec un process de vérification et régulièrement mises à jour. En cas de difficulté, il faut faire ce que l'on appelle un RETEX, c'est-à-dire un retour d'expérience.
Par exemple, dans le cas de notre dessert vicié, plutôt que de penser que le client ment, il aurait fallu faire un RETEX écrit et oral auprès des équipes pour les mettre au courant de la difficulté rencontrée, trouver la source du problème (personnellement, je pense que c'est une vis de casserole) et mettre en place une solution (vérification de l'état du matériel à hauteur d'une fois par jour par tel salarié).

2/ Ensuite, il faut se former initialement et tout au long de sa vie de restaurateur. Il y a une formation obligatoire, la formation HACCP, mais on peut toujours aller plus loin, échanger avec d'autres restaurateurs sur les règles mises en place au sein de leurs restaurants...

3/ Enfin, avant l'ouverture de l'établissement, il faut effectuer la déclaration sanitaire obligatoire. Toutefois, ce n'est pas parce qu'on l'a fait au début qu'on n'évalue pas régulièrement sa cuisine pour vérifier si les normes d'hygiène sont toujours aussi bien respectées et si le matériel est en bon état de fonctionnement.


Si vous nous lisez et que vous êtes restaurateur, vous pouvez télécharger notre guide sur le risque pénal du restaurateur.

Articles similaires